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C’est un projet aussi audacieux qu’urgent qui se déploie discrètement dans un zoo de Sydney. Pour contrer la disparition massive des récifs coralliens due au réchauffement climatique, des scientifiques conservent désormais des milliards de cellules de corail dans un congélateur à -196°C. L’objectif ? Redonner vie à la Grande Barrière de corail, en Australie.
Une réserve froide pour préserver l’avenir
C’est dans le cadre de la Taronga Conservation Society Australia que ce programme de cryopréservation a été lancé en 2011. Son principe est simple sur le papier : collecter des cellules reproductrices de coraux lors de leur brève période de reproduction annuelle, puis les congeler dans de l’azote liquide pour pouvoir les utiliser ultérieurement. Une sorte de banque de semences, mais pour l’océan.
Ces gamètes sont prélevés directement sur la Grande Barrière de corail. L’expédition est minutieusement orchestrée chaque année, car la fenêtre de reproduction naturelle des coraux est extrêmement courte. Une fois récupérées, les cellules (œufs et sperme) sont congelées à -196°C. À cette température, leur métabolisme est complètement figé, ce qui permet de les conserver pendant des décennies.
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Des premières naissances réussies
L’espoir est devenu plus concret en 2023, lorsqu’une équipe de scientifiques est parvenue à féconder des œufs frais avec du sperme corallien congelé. Cette réussite marque une avancée capitale dans la restauration des récifs. Les œufs ont non seulement été fécondés, mais ils ont également donné naissance à des larves viables, capables à terme de se fixer sur des substrats et de former de nouveaux coraux.
C’est une étape charnière, car elle valide le potentiel de cette conservation à long terme. Jusqu’ici, les tentatives reposaient sur des prélèvements de coraux adultes, bien plus complexes à déplacer et à faire survivre. Grâce aux gamètes congelés, la restauration pourrait être déployée de façon plus flexible, rapide et à grande échelle.
Répondre à une urgence écologique
La Grande Barrière de corail est l’un des écosystèmes marins les plus emblématiques au monde, mais elle souffre de manière dramatique. Les épisodes de blanchissement, provoqués par la montée des températures de l’eau, se multiplient et affaiblissent les récifs année après année. En 2024, l’Australie a connu un nouveau record de température océanique. Conséquence : près de 84 % des coraux dans le monde sont touchés, selon les experts.
Face à cette réalité, les scientifiques cherchent activement des moyens innovants pour protéger notre biodiversité sous-marine. La cryopréservation s’impose progressivement comme une solution complémentaire aux méthodes classiques de restauration.
Un projet collaboratif et international
Ce projet ne se limite pas à un effort local. Il s’inscrit dans un réseau mondial de conservation. Les techniques utilisées à Sydney pourraient bientôt être appliquées dans d’autres régions critiques, comme les Caraïbes ou l’Asie du Sud-Est. En parallèle, les laboratoires échangent des échantillons et des savoir-faire, accélérant les chances de succès à l’échelle globale.
Voici pourquoi cette initiative passionne autant :
- Elle permet de conserver une large diversité génétique de coraux, utile pour adapter les espèces à un climat changeant.
- Elle évite d’endommager les récifs encore en place, déjà fragiles.
- Elle ouvre la voie à des techniques de croisement entre différentes espèces de coraux, pour renforcer leur résistance.
Ce qui semblait encore utopique il y a dix ans prend aujourd’hui une forme concrète dans les frigos cryogéniques d’un zoo australien. C’est assez fou, mais plein d’espoir pour les océans.
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