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L’Espagne fait face à une crise du logement aiguë dans ses régions les plus touristiques. Trop de logements changent de vocation pour accueillir les visiteurs au détriment des résidents locaux. Cette tendance menace directement l’accès au logement pour les Espagnols, notamment sur les côtes et dans les îles, où la situation devient critique.
Les régions touristiques prises d’assaut par la location saisonnière
La Banque d’Espagne tire la sonnette d’alarme : dans certaines zones très prisées comme les îles Baléares, les Canaries ou encore le littoral méditerranéen, jusqu’à la moitié des logements ne sont plus disponibles pour les habitants. Ils sont transformés en hébergements touristiques, souvent loués à court terme via des plateformes comme Airbnb.
Ce phénomène s’accélère depuis plusieurs années. Les investisseurs étrangers et les propriétaires fléchissent de plus en plus leur patrimoine immobilier vers un usage touristique, bien plus lucratif. Résultat : les locaux ont de plus en plus de mal à se loger sur leur propre territoire.
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À Malaga par exemple, 40 % des logements seraient orientés vers le tourisme. À Alicante, ce chiffre atteint déjà 35 %. Mais c’est dans les archipels qu’on touche un sommet, avec parfois plus d’un logement sur deux qui n’est plus accessible en location longue durée.
Un accès au logement de plus en plus restreint
Ce détournement massif des logements est d’autant plus problématique qu’il s’inscrit dans un contexte de faibles investissements publics et privés dans le secteur locatif classique. Les politiques locales peinent à construire de nouveaux logements abordables pour répondre à une demande en explosion dans certaines zones.
Pour la population locale, notamment les jeunes et les familles, cela devient un vrai casse-tête. Trouver un logement à l’année, proche de son lieu de travail ou de sa famille, relève presque de la mission impossible dans des régions entières.
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Les quelques biens encore sur le marché sont devenus inabordables. Les loyers explosent, tirés vers le haut par la concurrence du tourisme. Quant à l’achat, les prix grimpent eux aussi fortement, rendant l’accession à la propriété de plus en plus lointaine pour de nombreux Espagnols.
Des zones rurales à l’opposé du spectre
À l’opposé, certaines provinces espagnoles font face à une situation complètement inverse. Dans des régions comme Ávila ou Teruel, on compte deux fois plus de logements que de foyers. Ces zones rurales, souvent dépeuplées depuis plusieurs décennies, peinent à attirer de nouvelles populations.
Paradoxalement, l’Espagne ne manque pas de logements dans l’absolu. Elle manque surtout de logements là où ils sont nécessaires. Ce déséquilibre territorial rend la crise encore plus absurde : là où il y a des maisons en trop, il n’y a plus personne pour y vivre ; là où les gens veulent vivre, il devient presque impossible de se loger.
Un paradoxe qui interroge sur les politiques d’aménagement du territoire et de régulation du tourisme. Car si les touristes sont les bienvenus, encore faut-il qu’ils ne prennent pas toute la place.
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Vers un modèle à réinventer
Face à ce constat, plusieurs villes espagnoles commencent timidement à réagir. Certaines mettent en place des quotas sur les locations de courte durée, d’autres interdisent carrément leur prolifération dans certains quartiers.
Mais les acteurs du secteur touristique ne comptent pas lâcher aussi facilement un marché rentable. Et pour l’instant, les mesures restent souvent trop limitées ou mal appliquées pour inverser la tendance.
L’équilibre entre dynamisme touristique et respect de la vie locale s’impose pourtant comme un enjeu clé. Car si l’Espagne continue de privilégier le tourisme au détriment de ses habitants, elle risque d’en payer le prix sur le long terme. Le logement, c’est un droit fondamental. Et dans certaines régions, il devient un luxe.