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Techniquement on l’appelle l’arnaque sentimentale mais, plus prosaïquement, on pourrait la définir comme un « piège à miel ». Et, de plus en plus souvent, nombreuses sont les victimes qui tombent dans le réseau d’escrocs sans scrupules qui, se fiant aux sentiments. Des malfrats qui n’hésitent pas à faire chanter les personnes les plus faibles à travers le web.
Une arnaque au faux militaire sévit d’ailleurs. Ainsi, Anna a perdu des milliers d’euros à cause des manipulations d’escrocs sur internet que l’on appelle « les brouteurs ». Elle a rebondi en créant une association d’aide aux victimes, à La Flèche (Sarthe).
L’arnaque commence sur Facebook
En août 2019 Anna a eu le malheur de répondre à un inconnu qui lui a envoyé un message sur internet. Mais à l’époque, cette femme de 50 ans a avoué n’avoir « jamais entendu parler d’arnaque sentimentale ».
Depuis qu’elle en a fait la douloureuse expérience, Anna s’évertue à vouloir protéger les autres. Les victimes qui, comme elle, ont plongé dans les filets d’un homme amoureux qui n’existe pas sinon pour soutirer de l’argent.
Anna a été la victime d’une « arnaque aux faux-militaires ». « Des hommes se font passer pour des légionnaires, dont ils ont usurpé l’identité« , confie-t-elle.
Ce pseudo-légionnaire, Adrian, ayant pour pseudo-résidence le sud de la France a alors envoyé beaucoup de photos à Anna.
Ainsi, c’est sur un groupe Facebook de séries TV qu’Anna, qui habitait alors Durtal (Maine-et-Loire), qu’Adrian la contacte. Alors que cette mère de famille était en couple, elle n’accorde aucune attention aux premiers messages, du pseudo Adrian Fernandez.
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L’escroc racontait alors à Anna qu’un ami à lui avait trouvé l’amour sur internet et qu’il rêvait du même sort. « Il était heureux d’être tombé sur moi », a confié Anna.
Au bout d’un cinquième message, Anna répond. « Je ne sais pas pourquoi, par curiosité », a-t-elle expliqué arnaque.
La discussion va bon train avec échanges de photos sur Facebook Messenger. Adrian se présente alors comme un légionnaire, demeurant à Aubagne (Bouches-du-Rhône), siège de la Légion étrangère.
« Ça m’a sortie de mon train-train »
Echange après échange, jour après jour, Anna s’attache alors doucement à Adrian.
« Dans mon couple, c’était la routine après 26 ans de vie commune. Cet homme était attentionné, il me disait de belles choses. Ça m’a sortie de mon train-train », explique Anna
Anna commence à avoir des papillons dans le ventre et la passion commence à prendre place. « Il disait que j’étais la femme de sa vie. Qu’il avait hâte de me rencontrer. Il voulait qu’on ait un bébé ensemble », a-t-elle confié.
Et elle y croit ! Elle n’a qu’une envie : « le rencontrer ». Mais Adrian repousse sans arrêt le moment. « On programmait de se voir et, au dernier moment, il avait toujours une excuse », a raconté Anna.
Deux mois après le début de leur attachement, Adrian formule les premières demandes d’argent.
« Il m’a demandé 50 euros pour payer son forfait téléphonique. Il m’a dit que sans ça on ne pourrait pas s’appeler« , a confié Anna
Elle lui envoie alors sur le champ 50 euros de recharge dans un tabac-presse sur une carte prépayée. Mais elle ne reçoit aucun appel. À ce moment-là, elle ne doute toujours de l’arnaque. « J’étais naïve, sous le charme ».
Alors que le pseudo-militaire multiplie les demandes d’argent, souvent 50 euros, et sous la même forme de recharge téléphonique, le (vrai) couple d’Anna vole en éclat en octobre 2019. « Mon ex-conjoint a découvert mes conversations, ça a dégénéré, je ne préfère pas en parler », a-t-elle, en effet, expliqué.
Anna se sépare de son mari et se retrouve seule. Elle déménage dans un appartement Sarthe Habitat, à La Flèche.
Un groupe de victimes d’arnaque sur internet
Avec l’auteur de l’arnaque qu’elle n’a toujours pas rencontré, les échanges se multiplient. Et les demandes d’argent aussi. « Les montants étaient désormais de 150, 200 voire 500 euros », a-t-elle confié.
Pendant toute l’année 2020, Anna, ne flairant pas l’arnaque, continue d’envoyer de l’argent. Elle a offert 5 200 euros à cet inconnu au détriment de son loyer et de ses factures.
« J’étais bête. J’ai réagi fin 2020, quand je suis tombée sur un groupe de victimes d’arnaques sentimentales, sur internet », a expliqué Anna.
Elle découvre alors le procédé de l’arnaque aux « faux -militaires » et commence enfin à tout réaliser !
« Je l’ai interrogé, mais il a nié. Il continuait d’affirmer qu’il était toujours à la Légion étrangère. On s’est enfin appelés. Ça a été très bref. J’ai reconnu l’accent des pays de l’Est dans sa voix. C’est venu confirmer mes doutes », a-t-elle expliqué.
Anna dépose alors une plainte qui n’a jamais abouti, car l’identité de l’usurpateur n’a pu être retrouvée.
« J’étais très mal. J’avais tout perdu. Je me suis retrouvée à devoir constituer un dossier de surendettement », a confié Anna
« Je refusais de parler de cette histoire » a-t-elle alors expliqué pour justifier son mal-être profond après avoir tenté de mettre fin à ses jours, plusieurs fois.
Cette affreuse période s’éclaircira enfin en juillet 2021. « J’ai retrouvé un emploi dans un Ehpad, ça m’a changé les idées ».
La même année, Anna accepte enfin de témoigner, visage caméra, au journal télévisé de TF1.
Et, en 2022, Anna crée une association d’aide aux victimes d’arnaques sentimentales.
Aujourd’hui la victime de cette horrible arnaque travaille au Prytanée militaire de La Flèche. « Je revis, je ressors de chez moi », a-t-elle conclu.